jeudi 10 février 2011

PREMIER BEBE DU DOUBLE ESPOIR : Umut-Talha


Dans L'Ingénu de Voltaire, le fait de savoir si la belle Saint-Yves commet un péché en succombant aux avances du ministre Saint-Pouange pour sauver l'Ingénu, relève de la même casuistique que celle employée par les détracteurs du DPI: il s'agit de déterminer si la pureté de l'intention excuse la faute. Pour les instances conservatrices, la lecture de l'ingénu de Voltaire dénoncerait simplement l'adultère d'une femme alors qu'il faut y voir en fait une femme qui se sacrifie pour sauver celui qu'elle aime. De la même façon, ces instances voient en le double espoir une vision simpliste et erronée d'un tri d'embryon qui mène à leur destruction.


Le premier "bébé-médicament" en France, qui permettra de soigner l'un de ses aînés pour lequel il est un donneur compatible, a vu le jour à l'hôpital Antoine Béclère à Clamart, ont annoncé lundi à l'AFP le professeur René Frydman.

Les spécialistes parlent de "bébé du double espoir" car les méthodes utilisées pour aboutir à sa naissance offrent aux parents à la fois l'espoir d'avoir un enfant qui ne souffrira pas d'une grave maladie comme ses aînés et qui permettra aussi de soigner l'un d'entre eux.

Le petit garçon, Umut-Talha (en turc "notre espoir"), qui pesait 3,650 kg à sa naissance le 26 janvier dernier, est "en très bonne santé", a indiqué à l'AFP le Pr Frydman.



Il est né par fécondation in vitro après un double diagnostic génétique pré-implantatoire (DPI) permettant le choix des embryons.

Cette double procédure de diagnostic a permis de s'assurer d'une part que l'enfant était indemne de la grave maladie génétique (bêta-thalassémie) dont souffrent les premiers enfants de la famille, mais aussi qu'il pouvait être donneur compatible avec l'un de ses aînés malades.

Cette compatibilité tissulaire (HLA) permet d'envisager ultérieurement une greffe de sang du cordon ombilical qui a été prélevé après sa naissance, pour soigner son aîné malade.

La bêta-thalassémie est une maladie génétique grave et invalidante. Cause d'anémie, elle rend nécessaires à la survie des transfusions sanguines répétées.

Les parents, d'origine turque âgés d'une trentaine d'années, et leur garçon sont rentrés chez eux dans le sud de la France.

Il y a déjà eu des naissances de "bébé-docteurs" dans le monde, mais c'est la première fois en France.

Les Etats-Unis ont commencé il y a une dizaines d'années, et quelques naissances ont été signalées plus récemment en Europe, en Belgique (les deux premiers annoncés par l'hôpital universitaire de l'AZ-VUB, près de Bruxelles en 2005) et en Espagne (une naissance en 2008).

La loi française de bioéthique de 2004 et ses décrets d'application, parus en décembre 2006, autorisent cette pratique après accord de l'Agence de la Biomédecine, d'où "cette première naissance HLA compatible".

L'un des deux embryons transférés, exempt de la maladie et d'un groupe HLA compatible avec un des aînés, s'est développé jusqu'à terme.

Aux Etats-Unis, il y a plus de dix ans Molly Nash, fillette de six ans, qui souffrait d'une maladie génétique, l'anémie de Fanconi affectant le système immunitaire, avait été sauvée grâce aux cellules extraites du cordon ombilical de son frère, Adam, dont l'embryon avait été sélectionné dans le but de réaliser cette greffe.



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En Espagne, le premier bébé-médicament, Javier, né en octobre 2008, a permis grâce à son sang de cordon ombilical de guérir son aîné Andrés, souffrant également d'une bêta-thalassémie majeure. Andrés n'a plus besoin des transfusions sanguines, auparavant nécessaires pour le maintenir en vie, précisaient ses médecins.




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La bêta-thalassémie, dont il existe des variantes plus ou moins sévères, est une maladie répandue dans les populations du bassin méditerranéen, l'ensemble du Moyen-Orient, le sud et l'est de l'Asie, l'Afrique et les Antilles.

La maladie est due à un gène commandant la production d'un composant essentiel de l'hémoglobine qui transporte l'oxygène dans les globules rouges.


source : AFP